Depuis janvier 2023, l’AMIF nous a permis de réaliser plus de 20.000 heures de formation, permettant ainsi à 98 personnes (56 femmes et 42 hommes) de s’inscrire dans un dispositif d’alphabétisation en Wallonie picarde. Relevons que ces formations ne sont pas exclusivement réservées aux femmes : la mixité étant encouragée afin de promouvoir le respect mutuel, la solidarité et l’ouverture interculturelle. Ces valeurs semblent par ailleurs importantes également pour l’Union européenne, qui nous demande de veiller, dans le cadre de la mise en œuvre de notre projet cofinancé par l’AMIF, au respect de l’égalité entre les hommes et les femmes, à la promotion de l’intégration de la dimension de genre et à la prévention de toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle
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Concrètement, le programme AMIF nous permet de mettre en place quatre groupes de formations (deux à Mouscron et deux à Tournai) avec des horaires différents. Cette offre multiple permet d’organiser la formation à différents moments afin de les rendre plus accessibles, notamment pour les femmes très souvent retenues par des questions de garde d’enfants par exemple. La mise en place d’un accompagnement psychosocial en interne et en partenariat avec la PIT (Plateforme pour l’Interculturalité à Tournai) permet également d’aborder de nombreux points : recherche de crèche, aide juridique, santé…
Mais au-delà de l’animation des groupes de formations et de l’accompagnement psychosocial des personnes, soulignons aussi l’importance selon nous d’envisager notre travail dans une logique de réseau. En effet, pour répondre à la diversité des situations, une large collaboration partenariale est essentielle. Des partenaires comme Soralia, le Ciep du MOC, les CPAS, le Forem, le CIMB, le Ceraic, la Plateforme pour l’Interculturalité à Tournai ou encore les Centres de planning familial ou les Centres d’accueil pour demandeurs d’asile sont des relais fondamentaux pour nous aider à identifier et lever les freins : difficultés de logement, suivi médical, garde d’enfants, accès aux droits, lutte contre les violences intrafamiliales. Et en complément de ce travail en réseau, il s’agit également de pouvoir outiller notre équipe ; et si cela passe évidemment par des moments d’intervision et de la co-construction entre pairs, il est également important de proposer des formations. C’est ainsi que nos équipes sociale et pédagogique ont suivi entre autre une formation en quatre modules Femmes étrangères victimes de violences : quel accompagnement ? afin de :
- Détecter et aborder la question des violences intrafamiliales en contexte migratoire.
- Connaître les bases juridiques pour accompagner une femme en danger tout en préservant son droit de séjour.
- Accueillir la parole et instaurer un climat de confiance.
- Orienter vers les services spécialisés à Tournai (hébergement d’urgence, soutien psychologique, assistance légale).
Au-delà des compétences linguistiques (français oral, lecture, écriture, savoirs mathématiques, etc), il s’agit de considérer la formation comme un moyen d’émancipation et de participation à la vie sociale, culturelle, économique et politique. En tant que Mouvement d’Éducation Permanente, nous veillons à proposer des espaces de compréhension critique du monde, en abordant la place des femmes dans la société, leurs droits fondamentaux et la question du vivre-ensemble. Les formatrices et formateurs encouragent également la participation active à travers des projets collectifs : expositions, fêtes de voisins, ateliers créatifs ou échanges interculturels. L’objectif est de renforcer la solidarité et l’intégration en dépassant le « vivre ensemble » pour aller vers le « faire ensemble » que ce soit dans la réalisation d’un grand goûter interculturel ou la constitution d’une équipe de foot pour participer à un tournoi.
Cette approche globale s’appuie sur l’idée que la langue, à elle seule, n’est qu’une composante d’une démarche d’intégration. Selon l’analyse de la CFS ASBL, La langue : un indicateur d’intégration ?, elle n’est qu’un facteur parmi d’autres, nécessitant le soutien d’actions complémentaires : accès à l’emploi, reconnaissance des droits, mise en réseau et accompagnement adapté. C’est ce modèle qui oriente les formations en Wallonie picarde, afin que chaque participante et participant puisse développer ses compétences, sa confiance en soi et son autonomie, tout en trouvant sa place dans la société belge.
Aujourd’hui, plusieurs apprenantes témoignent de leur progression sur le plan linguistique, social et personnel : une autonomie grandissante dans les démarches administratives, l’envie de se former davantage ou encore l’intégration de projets citoyens et culturels. Cet élan conforte la conviction que l’action conjointe de l’Union européenne, de notre ASBL et des partenaires locaux prend tout son sens pour favoriser l’égalité des chances et l’intégration.
En matière de résultats concrets observés, l’analyse des entretiens d’évaluation menés deux fois par an nous permet de relever des résultats en termes de :
- Implication sociale : Les apprenantes participent davantage à la vie de leur quartier ;
- Relations sociales : Elles améliorent leurs interactions avec leur entourage, comme par exemple un apprenant qui souhaitait présenter ses condoléances de manière appropriée ;
- Accompagnement scolaire : Les mamans communiquent mieux avec les enseignants et suivent plus activement la scolarité de leurs enfants ;
- Insertion professionnelle : La confiance acquise leur permet de mieux s’intégrer dans leur environnement de travail (échanger avec ses collègues, sentiment d’appartenance au milieu professionnel) ;
- Autonomie administrative : Elles gèrent leurs démarches sans assistance, comme prendre des rendez-vous ou signaler un changement familial ;
- Aisance en français : La peur de s’exprimer diminue, facilitant leurs interactions avec des francophones ;
- Déplacements : La formation leur permet d’utiliser les transports en commun et d’accéder aux services essentiels ;
- Bien-être : Une meilleure connaissance de leur environnement et un sentiment de mieux-être sont constatés.
Ces résultats concrets illustrent l’impact des formations soutenues par l’Union européenne à travers le Fonds AMIF, qui visent à favoriser une intégration et une inclusion sociale effectives des ressortissants de pays tiers
. À l’intersection entre les enjeux des politiques européennes et les valeurs de l’éducation populaire, ce projet s’inscrit dans une vision de l’alphabétisation qui dépasse l’apprentissage de la langue pour devenir un outil d’inclusion, d’émancipation et d’action.
En renforçant l’autonomie, la participation sociale et l’accès aux droits, ces actions d’alphabétisation permettent aux femmes migrantes de s’impliquer davantage dans leur quartier, de mieux suivre la scolarité de leurs enfants, d’accéder plus facilement à l’emploi et de gérer leur quotidien avec confiance. En facilitant leur intégration au sein de la société, ces formations ne bénéficient pas seulement aux personnes concernées : elles contribuent également au dynamisme de notre région, la Wallonie picarde, participent au développement de la Belgique et, plus largement, répondent aux ambitions européennes d’une intégration fondée sur l’égalité des chances et la participation de toutes et tous.